La liberté d’une médecin conventionnée
Aurélie Mukwege a poursuivi ses études de médecine à l’UCLouvain (UCL). Férue de prévention et désireuse d’apporter son aide médicale au plus grand nombre, elle a finalement préféré la spécialisation en médecine générale à celle de pédiatre. Diplômée depuis l’an passé, elle a son cabinet à la Maison Médicale Jean Jaurès à Schaerbeek. « Je l’ai découverte grâce à ma mère qui est partenaire enfant-parent à l’Office de la Naissance et de l’Enfance (ONE) et y connaissait des médecins. Nous y partageons une grande proximité avec les habitants, en plus de collaborer avec les homes et les hôpitaux des alentours. J’y ai poursuivi une partie de mon assistanat durant mes études, je connaissais certains patients en m’y installant ! »
Pour surmonter l’étape « touffue » des démarches administratives nécessaires à son établissement comme médecin indépendante conventionnée, Aurélie Mukwege a pu compter sur l’entraide entre futurs collègues, dès l’UCL, où elle a aussi découvert l’existence d’Amonis. « Cet organisme est connu pour avoir été créé par des médecins pour les médecins. J’y bénéficie des recommandations d’un conseiller personnel. Il m’a orientée dans les méandres administratifs, mais aussi en matière de pension et d’assurances, et jusqu’au choix d’un comptable. C’est pratique ! »
Le grand saut en RDC, à l’hôpital Panzi
Investie dans sa pratique, à la Maison Médicale Jean Jaurès mais aussi à l’ONE, ponctuée par des sorties culturelles ou ses cours de samba, Aurélie Mukwege est restée liée à sa patrie familiale. Elle a dans son histoire personnelle des modèles inspirants : son grand-père, le pasteur Mukwege Chuma Matayo, personnalité du Sud-Kivu ; son père Herman Mukwege, à l’origine de l’association Beatil-Alt, venant en aide aux défavorisés dans la région de Bukavu ; et son oncle le Dr Denis Mukwege, prix Nobel de la Paix 2018 et détenteurs de multiples distinctions, créateur de l’Hôpital Général de Référence Panzi (Bukavu) et sa Fondation, dédiés majoritairement au traitement et à la réinsertion des survivantes de violences sexuelles.
« En tant que diplômée en médecine, j’ai toujours eu à cœur d’échanger avec mes collègues en RDC, plongés dans une situation de génocide depuis plus de 20 ans, et de me mettre à leur service lors d’un séjour sur place. » Ce vœu, mûri de longue date, elle l’a réalisé à l’été 2023 pendant près de deux mois. « Après y avoir retrouvé ma famille, j’ai rejoint comme bénévole l’hôpital Panzi où j’ai eu la chance de travailler dans le nouveau service des urgences, mais également dans le centre de prise en charge des patientes victimes de violences sexuelles. Elles y bénéficient d’un « traitement holistique » impressionnant basé sur quatre piliers : médical, de soutien psychologique, d’accompagnement légal et de réinsertion socio-économique, notamment grâce à Beatil-Alt. »
Bruxelles-Bukavu : deux réalités, une même humanité
De retour à Bruxelles, la Dr Aurélie Mukwege n’a-t-elle pas trouvé nos « petits bobos » bien futiles après cette expérience prégnante ? « Passer d’un cas de fièvre typhoïde ou d’une jeune fille violée à ceux d’un petit mal de dos ou d’un rhume peut sembler difficile. Mais il faut remettre les choses dans leur contexte. Nos petits bobos sont aussi le reflet d’un système de soins qui fonctionne, accessible à tous et ouvert à la prévention. Ce qui n’empêche pas que nous soyons aussi confrontés en Belgique à des cas très difficiles, souvent consécutifs à la précarité. C’est pareil au Congo, mais de façon dramatique, en y ajoutant la pauvreté et l’insécurité. Énormément de personnes n’y ont pas les moyens de se payer des traitements. Pour elles, la santé ne vient souvent qu’après avoir l’assurance d’avoir un toit pour la nuit. Quel que soit le contexte, je veux faire en sorte de me rendre utile. » Aurélie Mukwege entend apporter à nouveau son aide à la population congolaise à l’été 2024…